Citation de Pablo Neruda

lundi 21 novembre 2011

LE «WINNIPEG» OU LA POÉSIE EN ACTES DE PABLO NERUDA

En avril 1939, le gouvernement chilien de Front populaire confie à son consul à Paris, le poète Pablo Neruda, la mission de faire émigrer un grand nombre de réfugiés de la guerre d’Espagne, qui vient de s’achever avec l’entrée des troupes franquistes à Barcelone et Madrid. En France, un demi-million de républicains venus chercher refuge sont déclarés indésirables par le gouvernement Daladier, qui les enferme dans des «camps de la honte».

Le PCF met à la disposition du diplomate le cargo Winnipeg, appartenant à une compagnie de fret créée par l’Internationale communiste pour approvisionner clandestinement en armes l’Espagne «rouge». Les cales sont aménagées pour accueillir deux dortoirs et un réfectoire. Les autorités de la République en exil sélectionnent les candidats au départ, en veillant à une juste répartition entre communistes, socialistes, anarchistes et trotskistes. Le livre, comme le documentaire, donnent la parole aux derniers survivants de la traversée. Parti le 4 août 1939 du port de Pauillac, le Winnipeg arrive, non sans péripéties, un mois plus tard à Valparaiso, où la foule attend les réfugiés au son de l’Internationale.

L’équipée ne s’arrête pas là. Le commandant de bord, anticommuniste et futur collabo, accuse l’équipage, formé de militants communistes, de fomenter une mutinerie pour livrer le bateau à l’URSS. Les quarante marins reviennent en France menottés, ils passeront six mois en prison avant que la justice ne prononce un non-lieu général. Nous sommes fin mars 1940, le régime de Vichy est instauré trois mois plus tard et une longue chape d’oubli recouvre l’histoire du Winnipeg et de son voyage vers la liberté.

(1) «Né pour naître», Gallimard, «L’Imaginaire». (2) «De Madrid à Valparaiso, Neruda et le Winnipeg», de Marielle Nicolas et Jean Ortiz. Editions Atlantica, 112 pp., 15 €. (3) «La Traversée solidaire», de Dominique Gautier et Jean Ortiz (52 mn). Dimanche à 16 h 30 à Pessac (33) au festival du film d’histoire. Sur France 3 Aquitaine mercredi à 23 h 55.

samedi 5 novembre 2011

NERUDA : LA MORT INDUITE

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PABLO NERUDA DANS SON CERCUEIL
Le poète Pablo Neruda n'est pas mort du cancer de la prostate dont il souffrait. C'est la conclusion qui a été tirée des antécédents cliniques qui se trouvent dans le dossier du procès RÔLE 1038-2011, avec les résultats de cinq mois d'investigations judiciaires sur la mort de Neruda, dirigées par le juge Mario Carroza.

Le dossier –un document de 209 pages que la revue Proceso a pu consulter remet en question l'information livrée par la clinique Santa María le jour de la mort du poète, le 23 septembre 1973, dans laquelle on assure qu'il est mort de « cancer de la prostate métastasé » comme le signale son certificat de décès.

La version de cette clinique a été confirmée par la Fondation Neruda, qui a écarté, à plusieurs reprises, la thèse de l'homicide en contredisant les déclarations de l'assistant personnel et chauffeur de Neruda, Manuel Araya.

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AUX OBSÈQUES DE NERUDA, L'ÉCRIVAIN TERESA HAMEL
AVEC FRANCISCO COLOANE –ÉCRIVAIN QUI PRONONÇA
UN DES ÉLOGES FUNÈBRES AU PRIX NOBEL–,
MATILDE URRUTIA ET LA POÉTESSE ESTER MATTE AUTOUR
DU CERCUEIL AUX MOMENTS OU IL EST RECOUVERT
 DES COULEURS DU CHILI.
Dans un communiqué daté du 12 mai dernier, la Fondation a signalé : « Il n'existe aucune évidence, aucune preuve que ce soit indiquant que Pablo Neruda soit mort d'autre chose que du cancer avancé dont il souffrait depuis longtemps (…) ; il ne semble pas raisonnable de construire une nouvelle version de la mort du poète sur la seule base des opinions de son chauffeur, Monsieur Manuel Araya, qui insiste sur cette affaire sans autre preuve que son intuition. Les témoignages des personnes ayant été auprès de Neruda lors de ses derniers jours nous semblent beaucoup plus sérieux et dignes de confiance » .

L'enquête judiciaire pour déterminer les causes de la mort du poète chilien a débuté le 8 mai 2011, lorsque cet hebdomadaire a publié le reportage « Neruda a été assassiné » (Revue Proceso N° 1801) dans lequel Araya dénonce que Neruda est mort par l'application d'une injection létale dans l'estomac.

Dans la dite note Araya a aussi écarté l'idée que Neruda se trouvait dans un état grave dans les jours précédants sa mort. Il signala que le transfert depuis Isla Negra vers la clinique Santa María –le 19 septembre 1973- avait pour objet d'échapper au siège dont était victime l'auteur de Crepusculario et d'attendre à Santiago, dans un lieu que l'on croyait sûr, le départ de l'avion que le gouvernement de Luis Echeverría lui avait envoyé pour le conduire au Mexique.

Les antécédents cliniques et les témoignages apparus dans le procès semblent donner raison à Araya.

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LA UNE DU JOURNAL EL MERCURIO DE SANTIAGO DU 23 SEPTEMBRE 1973,
ANNONÇANT LA MORT DE PABLO NERUDA. LE QUOTIDIEN INFORME AUSSI
DES VASTES OPÉRATIONS MILITAIRES SUR LA VILLE ET MONTRE LES
BÛCHERS OU LES  SOLDATS BRULENT DES LIVRES, DES DISQUES ET DES REVUES.
Une fausse agonie

Les médecins du Département de Criminalistique de la Police judiciaire chilienne, José Luis Pérez et Patricio Díaz Ortiz, ont envoyé le 16 août à la Brigade de recherche sur les crimes contre les droits de l'homme -chargée des enquêtes dans le cas Neruda- le rapport 75, joint au dossier. Celui-ci contient l'analyse de 13 examens médicaux effectués sur Neruda entre 1972 et 1973.

LA VEUVE MATILDE URRUTIA ET QUELQUES PROCHES
VEILLENT LE CADAVRE DU POETE PABLO NERUDA
EN SEPTEMBRE 1973.
PHOTO EVANDRO TEXEIRA
Dans la rubrique des Considérations Médico- criminalistiques, lettre d, on peut y lire : « Il y a un fait qui attire l'attention et qui complique l'analyse. Dans la lettre du docteur Guillermo Merino -médecin traitant de Neruda- du 18 avril 1973, dirigée au docteur Vargas Salazar (urologue), il écrit : 'Cher collègue : au dos le résumé du traitement administré à don Pablo Neruda, que vous avez envoyé pour traitement de l'adénome de prostate et d'arthrose pelvienne droite '.

« Le problème dans ce cas remarquent les médecins de la police c'est que l'adénome est une tumeur bénigne et non maligne. »

Mais un autre antécédent pointe dans un sens opposé. Dans le deuxième point de la même rubrique, il est précisé que dans les antécédents envoyés, on peut observer un rapport de radiothérapie au cobalt (effectué entre le 19 mars et le 18 avril 1973). « La radiothérapie est un traitement appliqué en général dans le cadre de tumeurs malignes comme par exemple un cancer de la prostate (…) ; la radiothérapie ne s'emploie pas dans le cas des tumeurs bénignes », signalent les médecins.


LA MISE EN BIERE DE PABLO NERUDA EN 
SEPTEMBRE 1973,  DANS UN COULOIR DE
LA MORGUE À LA CLINIQUE SANTA MARIA, 
À SANTIAGO DU CHILI - 
PHOTO EVANDRO TEXEIRA
Le premier point des conclusions médico- criminalistiques signale : « nous ne disposons pas de l'examen objectif pour informer avec certitude la cause de la mort de Monsieur Pablo Neruda (…) puisqu'on ne dispose pas de la biopsie respective » .
Le quatrième point des conclusions précise : « En ce qui concerne l'examen qui pourrait orienter la présence de métastase, c'est-à-dire, les phosphatases acides et sa fraction prostatique; celles-ci sont normales, ce qui pourrait signifier, entre autres possibilités, qu'il n'y a pas de tumeur maligne, ou que celle-ci est circonscrite à la glande ou encore qu'elle fut éliminée par la radiothérapie. Comme on ne dispose pas des antécédents cliniques du patient, il n'est pas possible de tirer des conclusions en ce sens d'après cet examen » .

Ces conclusions coïncident avec des déclarations de la veuve de Neruda, Matilde Urrutia, faites à quelques médias espagnols en 1974 et qui apparaissent dans le dossier judiciaire, dont les contenus sont protégés au Chili par le secret de l'instruction .

Dans une note publiée par la revue Pueblo du 19 septembre 1974, Mme Urrutia soutient que « le cancer dont souffrait (Neruda) était très contrôlé et nous n'avions pas prévu de dénouement si soudain. (Neruda) n'eut même pas le temps de laisser de testament puisque pour lui la mort était encore loin ».

Matilde donna le même mois une interview à l'agence EFE dans laquelle elle a confirmé sa position : « Le cancer ne l'a pas tué. Les médecins, que nous avions vus quelques jours auparavant, lui ont dit qu'ils l'avaient contré et qu'il pourrait vivre quelques années de plus ». Ces déclarations apparaissent dans le reportage « Ombres sur Isla Negra » , du journaliste espagnol Mario Amorós, publié le 22 juillet de cette année dans la revue espagnole Tiempo.


QUELQUES PROCHES ET MATILDE URRUTIA, 
A VEUVE DU POÈTE PABLO NERUDA,
RECUEILLIES DEVANT SA DÉPOUILLE À 
SANTIAGO, EN SEPTEMBRE 1973.
Le dernier point le numéro cinq des conclusions du rapport médical mentionné, souligne la nécessité de disposer des fiches cliniques de Neruda et de la biopsie. Ces éléments n'ont pas été fournis par les institutions traitantes malgré la demande du juge Carroza, qui les a sollicités en vertu des démarches menées par les plaignants, les dirigeants du Parti communiste du Chili représentés par l'avocat Eduardo Contreras.

Le 28 juillet, Me. Contreras a demandé que la clinique Santa María fournisse le dossier médical du Prix Nobel. Le 22 août, le docteur Cristián Ugarte Palacios, directeur médical du dit centre de santé a répondu : « Vu le temps écoulé, je dois informer M. le juge que notre clinique ne possède pas l'information sollicitée. »


MISE EN BIÈRE DE PABLO NERUDA : MATILDE URRUTIA
( DEBOUT EN NOIR ) ET PRÈS D'ELLE  HERNÁN LOYOLA,
AMI ET BIOGRAPHE DU POÈTE. LE CERCUEIL DU PRIX
NOBEL EST POSÉ À MÊME LE SOL.  
PHOTO EVANDRO TEIXEIRA 

Dans une interview avec la revue Proceso, Me. Contreras exprime que cette disparition du dossier médical de Neruda « est inimaginable, non seulement parce qu'ils ont l'obligation de le préserver, puisque la loi dispose que les hôpitaux publics et les cliniques privées doivent conserver les fiches au moins 40 ans. De plus, il faut considérer que nous ne parlons pas d'un patient inconnu… Il s'agit de l'historique médical de l'un des deux uniques prix Nobel du Chili. Par conséquent, il semble assez curieux et suggestif que sa fiche n'existe pas à la clinique Santa María. »

Le juriste a ajouté qu'un prestigieux groupe d'oncologues, dont il a préféré taire l'identité pour l'instant, a analysé divers examens médicaux réalisés sur le poète dans sa dernière année de vie. Selon Me. Contreras, ils ont conclu qu'« il n'est pas possible d'accepter qu'il soit mort du cancer, qu'il n'y a pas eu de telle cachexie (affaiblissement profond de l’organisme ), que tout cela serait absolument faux » .
Me. Contreras a ajouté : « Comme on me l'a expliqué, la cachexie produit un état d'abandon dans lequel la personne est pratiquement un cadavre qui ne peut même plus parler. Et il s'avère que Pablo a parlé jusqu'à la dernière minute, et pas seulement avec l'ambassadeur du Mexique, Gonzalo Martínez Corbalá, mais aussi avec d'autres personnes. »

Dans un témoignage publié dans cet hebdomadaire (numéro 1804), Martínez Corbalá déclare que le samedi 22 septembre de 1973, il s'est présenté à la clinique pour l'informer que tout était prêt pour que lui et son épouse Matilde puissent partir pour le Mexique. Il affirme que « le poète avait meilleure mine. Et était également de meilleure humeur (…) ; Il avait l’air tout à fait maître de lui-même et je me risquerais même à dire qu’il semblait un rien optimiste ».


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LA VEUVE MATILDE URRUTIA ET QUELQUES
PROCHES VEILLENT LE CADAVRE DU POETE
 PABLO NERUDA EN SEPTEMBRE 1973.
PHOTO EVANDRO TEXEIRA
Tout cela contredit l’image d’un Neruda en train de mourir qu’offrent les dépêches médicales, acceptées jusqu'à présent comme la vérité officielle sur les derniers jours de Neruda.

Dans la feuille 206 du dossier judiciaire apparaît le témoignage de Rosa Núñez, infirmière de Neruda de 1960 à 1973. « Deux ans après la mort de don Pablo, un été, Madame (Matilde Urrutia) est venue me rendre visite. Elle m'a dit qu'elle pensait que son mari avait été tué à la clinique, sans doute par injection. Ce fut la dernière fois que je la vis ».

Cette déclaration apparaît dans la note « La solitude du capitaine », du journaliste Javier García et est publiée dans le journal La Nación du 18 septembre 2005.

Le journal chilien El Mercurio rejoint ces dires en informant le 24 septembre 1973 un jour après la mort de Neruda que ce dernier était mort « à la suite d'un choc subi après l’administration d’une injection».

Dans le reportage « Qui a tué Pablo Neruda ? », publié le 6 septembre dernier par la Revue Ñ, du journal argentin Clarín, le médecin Sergio Draper –qui s’est occupé du poète à la Clinique Santa María a déclaré : « Je n’ai vu Neruda que très rapidement le dimanche 23 septembre, ce n’est pas moi qui m’occupait de lui. Ce jour-là, l'infirmière de garde m'a dit qu'apparemment Neruda avait de graves douleurs, je lui ai dit d’administrer l'injection indiquée par son médecin, si je m’en souviens bien, c'était un anti-douleur… j'ai ordonné qu’on lui administre une injection indiquée par son médecin. J'ai été rien de plus qu'un interlocuteur. C'est un comble que nous soyons constamment soupçonnés ».

Draper s’était déjà exprimé en tant que témoin dans l'enquête pour le meurtre du président Eduardo Frei , survenu dans la même clinique en janvier 1982.


MANUEL ARAYA OSORIO, ANCIEN SECRÉTAIRE, 
ASSISTANT PERSONNEL  ET CHAUFFEUR  DE
PABLO NERUDA  (IL A OCCUPÉ CETTE FONCTION 
PENDANT PRÈS D'UN AN), ASSURE, DANS LES 
PAGES DU JOURNAL MEXICAIN PROCESO
QUE NERUDA FUT ASSASSINÉ ALORS QU'IL 
S'APPRÊTAIT À FUIR LE CHILI POUR MEXICO. 
PHOTO BLOG CHOFER-DE-NERUDA

Des obstacles


Dans la feuille 113 du dossier apparaissent les déclarations de nombreuses personnes liées à la Fondation Neruda, qui toutes rejettent la possibilité du meurtre de Neruda. Et ce, en discréditant Manuel Araya.

Entre autres, le chanteur et documentaliste Hugo Arévalo se fait remarquer. Il déclare que « le 18 septembre (1973) et devant les rumeurs de la mort éventuelle de Neruda, je me suis rendu, avec Charo Cofré (son épouse) à Isla Negra dans notre deux chevaux et nous avons été accueillis à l’arrivée par une personne qui s’est présentée comme son chauffeur (Araya) ».


Plus loin Arévalo signale que le poète « ne pouvait pas marcher et se sentait démoralisé » et qu’il leur a raconté que l'ambassadeur du Mexique au Chili lui avait proposé de sortir du pays. Malgré son angoisse Neruda aurait fêté avec eux le 18 septembre (anniversaire de l'indépendance chilienne) « c'est pour quoi, il nous a envoyés acheter des empanadas », affirma Arévalo.

Dans une interview avec Proceso, Manuel Araya a indiqué que le récit d'Arévalo corroboré par sa femme « est absolument faux ». Il affirme que ni Arévalo ni son épouse ont été à Isla Negra les jours postérieurs au coup d’Etat et que personne ne pouvait d’ailleurs aller les voir, parce que les militaires qui gardaient la maison empêchaient l’accès aux visiteurs. De plus, il a déclaré qu’ils n’ont jamais pris du vin et des empanadas ces jours-là « parce que nous n’avions pas le moral » .

 COUVERTURE DES MÉMOIRES MATILDE URRUTIA 
« MI VIDA JUNTO A PABLO NERUDA »
ISBN : 8432207349. SEIX BARRAL 
BIBLIOTECA BREVE. 1997. IN-8 CARRÉ. 

Selon Arévalo, lui et sa femme seraient restés dormir le 18 à Isla Negra. Le lendemain ils auraient accompagné Neruda et Matilde jusqu'à la clinique Santa Maria. Dans une interview accordée à la revue Rocinante en mai 2003, Cofré a reconnu qu'Araya a participé à ces faits. Il a conduit la Fiat 125 de Neruda alors que Pablo et Matilde se trouvaient dans l'ambulance. Mais dans sa déclaration judiciaire Cofré omet ce fait. Araya nie pour sa part de manière catégorique que ce couple ait été présent à ce moment-là.

Les déclarations de Cofré et d'Arévalo n'ont pas été sollicitées par les plaignants ni par le juge Carroza. Me. Contreras se demande : « Quelle est l'influence de la Fondation Pablo Neruda pour obtenir la déclaration des personnes qui n'ont pas été convoquées pour le faire ? Je le dis du fait qu'il y a une préoccupation curieuse de la Fondation Neruda pour appuyer la recherche, ou plutôt pour la faire pencher dans un certain sens. Alors je me demande : pourquoi est-ce si important pour eux ? Et lui-même se répond : « Je pense que la Fondation a intérêt à préserver l’image de son icône de marketing » .


LA TOMBE DE PABLO NERUDA
DANS LA NECROPOLE DE SANTIAGO, 1973

Matilde Urrutia a mentionné maintes fois dans ses mémoires Manuel Araya : « Le soir approchait et mon chauffeur avait disparu. La veille il m'avait conduit à la clinique (…) c’était la seule personne qui m’aidait. Pauvre garçon qui errait avec Pablo dans les marchés et les brocantes… Il avait disparu avec notre voiture, je perdais avec lui la seule personne qui m'accompagnait à toute heure du jour ».


Traduction MC

N. de l'E. - Publié originellement dans l'hebdomadaire Proceso (30/10/2011), l'auteur a autorisé la diffusion du reportage dans le Clarín du Chili

vendredi 4 novembre 2011

巴勃羅聶魯達

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PABLO NERUDA ET SA FEMME À VOLGOGRAD,  RUSSIE. PHOTO  STEPAN KURUNIN





巴勃羅聶魯達

¿QUIÉN MATÓ A PABLO NERUDA?

A poco de cumplirse un nuevo aniversario de su muerte, una denuncia de Manuel Araya, guardaespaldas y ex chofer del poeta chileno, apunta a que fue asesinado en la clínica.

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NERUDA. EN SU CASA DE ISLA NEGRA.

Por CAROLINA ROJAS


Las berenjenas fritas a medianoche es el primer capricho que Manuel Araya recuerda de ese “niño grande” que a veces podía ser Pablo Neruda. Aunque no fuera la estación indicada, él hurgaba por todos los mercados de la región para que el poeta pudiera degustar uno de sus platos favoritos. Sólo así conciliaba el sueño. Otras veces, a “Pablito”, le daba por cucharear una leche asada y conversar hasta el amanecer para espantar el insomnio que lo acechaba en sus últimas noches de invierno. “Se puso regalón, fue el único cambio que noté en él cuando se enfermó”, dice Araya, nostálgico del oficio que cumplió con la solemnidad de un samurái.

Después de que Neruda renunciara a su cargo como embajador en Francia y volviera a Chile en noviembre de 1972, Araya fue guardaespaldas y chofer del poeta. El día de ambos comenzaba cuando el escolta le llevaba un lavatorio para que Neruda remojara las manos antes de desayunar. Neruda seguía con un hojeo a los diarios, a las diez tomaba un jugo de frutas, y se ponía a escribir con tinta verde los versos y recuerdos que se iban amontonando. Entonces, Araya enumeraba ese caos de papel. “Mira qué ordenado me salió el compañero”, le decía el poeta, y le regalaba una de las sonrisas que pronto comenzarían a escasear.

El mensajero

En su niñez, Araya vivió en una hacienda del puerto de San Antonio, en la quinta región de Chile. Cuando tenía catorce años, fue la dirigente comunista y dos veces senadora, Julieta Campusano quien lo trató como un hijo y lo acogió en Santiago. Recibió preparación en seguridad e inteligencia. Aprendió rápido. Tanto, que llegó a ser mensajero del presidente Salvador Allende. Hoy, Manuel tiene sesenta y cinco años, y una memoria envidiable. Meticuloso, hilvana los detalles de una historia que podría demostrar que Neruda no murió por la ramificación del cáncer de próstata sino por una secreta actuación de terceros.

Araya tiene el pelo cano, y la impronta de un soldado. Llega hasta un paradero de San Antonio puntual y vestido en un impecable traje plomo. Conserva un aire que revela su antigua marcialidad y también cierta aspereza, esa propia de quien ha sufrido bastante en la vida. Ya instalados en la oficina del concejal Pedro Piña –quien lo ayuda con la investigación– comienza la entrevista. Parece otra persona cuando confiesa con la voz de un abuelo cariñoso, que ha soñado con el poeta; lo ve alegre y siente que lo llama. Hace unas semanas, Araya se enfermó de un extraño agotamiento que le impidió caminar, justo después de que su verdad saltara a la prensa internacional. “¿Sabe?, en un momento creí que me moría con tanto periodista preguntándome por la historia... Me habría ido feliz.”

Cruzado de brazos, Araya comienza a recordar cómo fueron los días previos a la muerte del poeta. Ahí están vívidos los allanamientos, los gritos y el miedo. Dos días después del golpe del 11 de septiembre, llegó un camión con más de cuarenta militares a revisar la casa de Isla Negra. Un capitán subió a la pieza y le dijo a Neruda que buscaban armas. El vate, con tristeza, miró por la ventana y vio cómo excavaban su jardín y cómo la bota militar aplastaba el país que tanto amaba. El terror comenzaba a ser insostenible.

El 19 de septiembre estaba todo listo para el viaje de Neruda a México, pactado con el presidente de este país y su embajador en Chile, Gonzalo Martínez Corbalá. Araya, Matilde Urrutia y el poeta partieron rumbo a Santiago. El destino era la Clínica Santa María para evitar que Neruda corriera más riesgos en la casa de Isla Negra. Según Araya, el Nobel depositó todas sus esperanzas en una mejoría en México.

Matilde, su última mujer, acompañó al poeta en la ambulancia que pidieron, y de cerca los seguía Araya en un auto Fiat 125 de color blanco, que habían comprado un mes antes. Desde el golpe, la ciudad y las carreteras estaban completamente militarizadas. Durante el viaje fueron hostigados e interceptados cada dos kilómetros para ser registrados.

Este episodio no es de extrañarse. Tras el 11 de septiembre, Isla Negra quedó bajo la gobernación de Manuel Contreras, quien quedó a cargo de la zona Tejas Verdes y Melipilla. Así consta en el registro de los gobernadores provinciales de San Antonio entre 1920 a 1973. Es decir, el entonces coronel Contreras, “El Mamo”, se dedicó a formar centros de detención y a ensayar para convertise en el director de lo que, a finales de 1973, sería la temible Dirección Nacional de Inteligencia (DINA).

Araya sigue desahogándose de esta especie de conjuro. No se olvida de la parada en Melipilla. “Hicieron bajar de la camilla a Neruda para revisarlo con la excusa de encontrar armas. A don Pablo lo movían como un muñeco, él pidió clemencia. No hubo caso”. Llegaron a la clínica rozando el toque de queda y Neruda quedó internado en la pieza 406. Al día siguiente, el poeta siguió pasando en limpio algunos poemas con Homero Arce, su corrector. Insistía en seguir viendo las noticias en la televisión, pero Matilde ordenó que se la llevaran. Lo protegió de toda verdad: sus casas asaltadas, el asesinato de Víctor Jara y el vertedero de cadáveres en que se había convertido el río Mapocho.

El poeta les pidió a Manuel y a Matilde que regresaran a Isla Negra en busca de ropa y libros. Según Araya, salieron el 22 de septiembre y aún no se resigna de ese flanco que dejaron. “Fue un error, no debimos dejarlo solo al cuidado de su hermana Laura: ella no veía bien.” Mientras buscaban las cosas, una empleada de la Hostería Santa Elena, les llevó un ominoso recado. “Dice don Pablo que se vayan urgente, alguien lo inyectó en el estómago mientras dormitaba”. Parte de este testimonio es corroborado por Matilde Urrutia en su libro Mi vida junto a Pablo Neruda.“Sonó el teléfono. Era Pablo. Me pedía que regresara inmediatamente: ‘no puedo hablar más’, me dijo. Yo creí que había pasado lo peor; en forma afiebrada cerré la valija, y me puse en camino. Lo van a detener, pensé casi enloquecida. ‘Tenemos que ir lo más rápido que pueda’, le dije al chofer. No sé cómo no nos matamos”. Manuel corrige un detalle de esta versión: “En ese tiempo ya habían cortado el servicio telefónico y los mensajes los recibíamos a través de la hostería”.

Araya recuerda que cuando llegaron a la Clínica, bajó las maletas de Neruda y las dejó en el auto diplomático que llevaría al vate al aeropuerto. Subió a la habitación, vio al poeta con la cara rojiza y con un pinchazo en el abdomen, una mancha que se extendía como ocurre con la picadura de un mosquito. Mojó una toalla para tratar de bajar la fiebre de “Pablito”. Recuerda que entró un médico a la habitación. “Era moreno y de bigotes, me dijo que tenía que comprar un medicamento, una receta que decía Urogotán y me indicó que la podía encontrar en una farmacia de la calle Vivaceta”.

Manuel subió al Fiat, tomó la calle Balmaceda y cuando iba llegando a su destino, lo detuvieron dos autos, que lo emboscaron, uno adelante y otro atrás.

–¡Huevón! ¿Eres el secretario de Neruda? –gritaban mientras lo abofetaban–. ¡Contesta!

Araya terminó en el suelo, con golpes y un disparo directo en la pierna izquierda.

Ahora sale del trance. “Le voy a mostrar”, dice Araya. Tiene una cicatriz de cinco centímetros bajo su rodilla. “¿Cómo sabían que era yo? Siempre he creído que desde la clínica estaban coludidos con la gente que me detuvo”, confiesa.

Después de estar detenido en una comisaría, a la medianoche fue trasladado al Estadio Nacional. Fue torturado e interrogado sobre el paradero de dirigentes comunistas. No cesaban las patadas ni los puñetazos. “No los conozco, no sé de qué me hablan.” Neruda le había advertido una vez que lo iban a castigar por haber trabajado como su asistente, que le preguntarían por “los compañeros” y le pidió que aunque le sacaran los ojos, nunca dijera nada. Araya cumplió su promesa.

Seis días después, fue el cardenal Raúl Silva Enríquez, encargado de resguardar a los perseguidos de la época, quien lo encontró y pidió atención médica para él. “El curita me dijo que don Pablo había muerto a las diez y media de la noche del 23 de septiembre. No lo podía creer”. Araya estuvo detenido 45 días. Sus torturadores lo liberaron en noviembre.

El diario La Segunda, del 24 de septiembre de 1973, corrobora la desaparición de Araya y la denuncia de Matilde. El vespertino cambia un elemento en la historia: dice que Manuel se extravió cuando fue a comprar una corona de flores para Neruda. Un hecho que Araya niega rotundamente. En el diario publica: “La viuda se limitó a pedir respeto por el dolor, así como denunció también que en la tarde de ayer habían desaparecido su chofer y su auto particular, luego que el conductor se dirigió a comprar una corona. No retornó y no ha vuelto a saberse de él”. Matilde Urrutia también lo documenta en su libro. “Ya se acercaba la tarde y mi chofer no había aparecido. El día anterior me dejó en la clínica y se fue a guardar el coche (...). Supe que lo detuvieron cuando llegamos de la isla, a poco de dejarme en la clínica. Y, en ese momento que yo le hacía buscar, él estaba en el Estadio Nacional sufriendo las torturas más atroces. Según ellos, era duro y no confesaba nada. Pobre muchacho que vagabundeaba con Pablo por mercados, por casas de antigüedades (...) con él yo perdía la única persona que me acompañaba en todas horas del día”.

Un doctor de turno

Eduardo Contreras, abogado querellante del caso y reconocido por su labor en materia de derechos humanos, revela que el certificado de defunción de Neruda dice que se encontraba en estado de caquexia, es decir en extrema desnutrición y debilidad. Esa condición no coincide con el testimonio de Araya, ni con el del ex embajador de México en Chile, Gonzalo Martínez Corbalá. “Gonzalo me dijo ‘Pablo estaba tan robusto como siempre’, habló con él en su habitación, vieron los últimos detalles del viaje, el 23 el avión ya estaba en la loza del aeropuerto (...) Aún no hemos pedido la exhumación del cuerpo de Neruda, hasta que se haga necesario para comprobar que se le administró alguna sustancia tóxica o no”, explica Contreras, para quien basta pensar que Neruda pasó sus últimos días en la Clínica Santa María, el mismo establecimiento donde en 1984 fue asesinado el ex presidente Eduardo Frei Montalva con tres dosis de inyecciones de talio y componentes de gas mostaza. En el caso, fueron procesados cuatro doctores. “Que Neruda fuera un objetivo militar es un hecho serio y el deber nuestro es pedirle a la justicia que se investigue hasta el final”, dispara el abogado.

El embajador Martínez Corbalá hizo una declaración jurada en México, que podría llegar estos días para presentarla.

Entre los microfilms medio dañados de la Biblioteca Nacional, la prensa de la época relata las imprecisiones de los hechos entre el 23 y el 24 de septiembre. El Mercurio de Valparaíso publica el lunes 24 que Pablo Neruda está grave por consecuencia de un shock sufrido por una inyección de calmante, y agrega otros datos: “La baja brusca de presión que experimentó ayer, tras haberle dado una inyección calmante, obligó al médico tratante Roberto Vargas Salazar, distinguido urólogo y nefrólogo, a llamar a interconsulta a un cardiólogo. “Se trata de una baja de presión muy importante’ nos explicó el médico y profesor de cardiología, quien no quiso sin embargo, identificarse”.

El Mercurio de Santiago del 24 de septiembre publica “El vate chileno, que recibió el Premio Nobel de Literatura en 1971, había sido internado en estado grave en mencionada clínica el sábado. Posteriormente, a consecuencia de un shock sufrido luego de habérsele puesto una inyección de calmante, su gravedad se acentuó”.

En la prensa del 23 de septiembre de 1973 aparece el nombre de Sergio Draper, como uno de los doctores de turno. Tras un previo rastreo, Draper, cirujano vascular acepta conversar con Ñ en su consulta (trabaja en un centro médico). Tuvo que declarar para el caso Frei, donde también fue médico de turno. Nunca ha hablado con la prensa. Contesta ofuscado, pero quiere entregar su versión donde avala el proceder de la clínica. “Sucedió hace cuarenta años, Neruda entró con un cáncer de próstata, ese diagnóstico se lo habían hecho en Francia y acá llegó con múltiples metástasis; un cáncer terminal, diseminado en todo el organismo, un estado de precoma.”

–¿Ha leído las declaraciones de Manuel Araya, ex chofer de Neruda?

–Eso lo ignoro pero sí puedo decir que el tratamiento que se le hacía a Neruda era el indicado por Vargas Salazar. La clínica no hace ningún tratamiento que no sea el indicado por el médico tratante. (...) Lo vi solamente un instante el domingo 23 de septiembre, a mí no me correpondía atenderlo. Ese día, la enfermera de turno me dijo que aparentemente Neruda sufría de mucho dolor, le dije que se le aplicaría la inyección indicada por su médico, si mal no recuerdo fue una dipirona. Si la clínica era tan mala, ¿por qué los médicos tratantes llevaban a sus pacientes?

–En la clínica Santa María se asesinó al presidente Frei Montalva, es posible tener dudas, al menos de que pudo haber dolo en la atención al vate.

–Ordené que se le diera una inyección indicada por su médico. Fui nada más que un interlocutor. Es el colmo que estemos constantemente bajo sospecha...

Araya insiste que a Neruda algo le hicieron en la clínica, y asegura que seguirá buscando pistas que avalen su testimonio. Se frota los brazos de frío, y se da cuenta de que ya oscureció. “Lo quería harto, sabe”, dice, para explicar que fue bueno conocer ese lado del poeta que muchos ignoran; el cercano, pero también el acérrimo comunista. Días antes del golpe, leyó Los sonetos de la muerte de Mistral. Quizás ya presagiaba la pesadilla que se avecinaba, y tal vez hasta su propio deceso. Araya se da cuenta de que no ha contado el final de su sueño. “Ah, a Pablito lo veo sonriendo. Lo escuché clarito, me dijo: ‘Manuel parece que llegamos a un feliz puerto’”.

SOMBRAS SOBRE ISLA NEGRA

La Justicia chilena investiga el posible asesinato de Pablo Neruda por orden del general Pinochet. Su chófer denuncia que le pusieron una inyección letal en una clínica de Santiago de Chile.

par Mario Amorós
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LE POÈTE PABLO NERUDA  LE 13 JUIN 1966, SUR LE PONT D'UN BATEAU À NEW YORK LORS DE LA 34 ÈME CROISIÈRE AUTOUR DE MANHATTAN ORGANISÉ PAR LE  PEN CLUB INTERNATIONAL. PHOTO  SAM FALK
Manuel Araya tenía 26 años cuando en diciembre de 1972 empezó a trabajar como chófer y escolta de Pablo Neruda, quien acababa de abandonar la embajada en Francia para refugiarse en su casa de Isla Negra: quería cuidar su salud. Araya ha roto casi 38 años de silencio para denunciar que Neruda no murió a consecuencia del cáncer de próstata que padecía, sino que fue asesinado por la dictadura del general Augusto Pinochet. El juez chileno Mario Carroza está investigando la querella presentada por el Partido Comunista de Chile (PCCh) y es posible que en las próximas semanas solicite la exhumación de los restos del autor de Veinte poemas de amor y una canción desesperada, premio Nobel de Literatura de 1971.

El 19 de septiembre de 1973 Neruda fue trasladado desde Isla Negra, en el litoral central, a la clínica Santa María de Santiago, ya que la dolorosa derrota de la Unidad Popular y la muerte de Salvador Allende le habían causado una inmensa aflicción y un súbito empeoramiento de su salud. En aquel hospital le visitó el embajador de México, Gonzalo Martínez Corbalá, quien le transmitió la invitación de su presidente para acogerle junto con su esposa, Matilde Urrutia. Acordaron partir el sábado 22 en el avión enviado por el Gobierno azteca, pero aquella mañana, cuando Martínez Corbalá llegó para acompañarles al aeropuerto, solicitó permanecer en Chile dos días más.

Por ello, Manuel Araya explica que a las ocho y media de la mañana siguiente Neruda les pidió a Matilde Urrutia y a él que regresaran a Isla Negra para recoger sus últimas cosas. “Hacia las cuatro de la tarde nos llamó por teléfono y nos dijo que, mientras dormía, alguien había entrado en su habitación y le había puesto una inyección. Cuando llegamos, unas dos horas después, vimos que estaba rojizo, con fiebre y que se quejaba de un intenso dolor”. Un médico solicitó a Araya que saliera a comprar un medicamento, pero unos carabineros le siguieron y le propinaron una paliza antes de abandonarlo en una comisaría y de ser llevado finalmente al Estadio Nacional, donde fue torturado. Solo varios días después pudo conocer la muerte del poeta, que atribuye a aquella misteriosa inyección y de la que responsabiliza a Pinochet, consciente de que la voz de Neruda en el exilio sería un poderoso ariete contra su régimen.

Por su parte, Matilde Urrutia escribió en sus memorias (Mi vida junto a Pablo Neruda, publicadas por Seix Barral en 1986, un año después de su muerte) que, aunque su esposo pasó muy mal su última noche y la enfermera de guardia tuvo que inyectarle un calmante para que pudiera dormir, no pensó “ni por un momento, que Pablo se moriría”: “En este último tiempo, el doctor me había asegurado que se defendía maravillosamente del cáncer que lo aquejaba y lo había visto lleno de vida y entusiasmo”.

“No murió de cáncer”.

La vida de Pablo Neruda se extinguió a las diez y media de la noche del 23 de septiembre de 1973, en la habitación 402 de la clínica Santa María. No se le practicó autopsia pues no había sospechas de homicidio o suicidio. Al día siguiente, su amigo Luis Enrique Bello se dirigió al Registro Civil para inscribir la defunción y aportó el certificado del urólogo que atendió al poeta durante los últimos años, Roberto Vargas Salazar (fallecido hace cinco lustros), quien señaló como causa del fallecimiento: “Caquexia cancerosa. Cáncer prostático, metástasis cancerosa”. Uno de sus hijos, Fernando Vargas, señala: “Mi padre lo atendió durante varios años. Me dijo varias veces que Neruda había sufrido un cáncer prostático metastásico y que había fallecido por ese motivo”. En cambio, una portavoz de la clínica Santa María consultada por Tiempo ha declinado opinar acerca de esta investigación judicial: “No estamos haciendo declaraciones, en el fondo no hay nada que decir”.

¿Cómo que no hay nada?

Sin embargo, varios hechos y testimonios sugieren lo contrario. En primer lugar, como subraya la querella presentada por el Partido Comunista, la caquexia, que el certificado de defunción menciona como causa de la muerte, es un estado de extrema desnutrición (producido por enfermedades como el cáncer) y en sus últimos días Neruda mantenía su sobrepeso de 100 kilos. Además, desde México, Gonzalo Martínez Corbalá ha recordado que el 22 de septiembre, cuando le vio por última vez, no sufría el grave estado que le atribuye el certificado de defunción y que su estado era similar al de semanas atrás, cuando le visitó en Isla Negra. En tercer lugar, el 24 de septiembre de 1973, al informar de la muerte del poeta, el diario El Mercurio señaló el grave perjuicio de una inyección: “A consecuencia de un shock sufrido luego de habérsele puesto una inyección de calmante su gravedad se acentuó. La baja brusca de presión arterial (hipotensión) causó alarma al médico tratante, profesor Roberto Vargas Salazar, quien solicitó la concurrencia de un cardiólogo, el cual diagnosticó su estado grave”.

Pero lo que más llama la atención son las declaraciones de Matilde Urrutia a varios medios españoles un año después. En una entrevista publicada por Pueblo el 19 de septiembre de 1974, afirmaba: “La verdad única es que el duro impacto de la noticia [del golpe de Estado] le causó que días más tarde se le paralizase el corazón. El cáncer que padecía estaba muy dominado y no preveíamos este desenlace tan repentino. No alcanzó ni a dejar testamento, pues la muerte la veía aún muy lejos”. En otra concedida a Efe aún fue más asertiva: “No le mató el cáncer. Los médicos, a los que habíamos visto unos días antes, le dijeron que lo habían atajado y que podría vivir unos años más”.

El testimonio de Manuel Araya ha sido recibido con incredulidad por algunas personas muy próximas a Neruda, en primer lugar por su largo silencio, que él justifica: “Golpeé las puertas de todos los medios de comunicación y nadie me quiso escuchar. Fui a hablar cinco veces con dirigentes del Partido Comunista, pero tampoco me hicieron caso hasta ahora. Por fin me he quitado este peso de encima”. Sostiene que cuando se rencontró con Matilde Urrutia en 1974 le planteó la necesidad de denunciar públicamente el crimen, pero ella se negó: “Temía que, si lo revelaba, le quitarían los bienes de Neruda, que creo que era lo único que tenía”. Sus afirmaciones contradicen el compromiso que demostró con la defensa de los derechos humanos y la lucha contra la dictadura, tal y como recuerda Viviana Díaz, dirigente histórica de la Agrupación de Familiares de Detenidos Desaparecidos: “Cada vez que hacíamos alguna denuncia ante la junta militar o los tribunales, Matilde nos daba su apoyo, no en vano su sobrino nieto David Urrutia fue secuestrado en 1975 y hecho desaparecer”. La acusación de encubrir el asesinato de su esposo es lo que más preocupa al profesor Hernán Loyola, reconocido internacionalmente como el principal estudioso de la vida y la obra del poeta: “Por supuesto, descarto absolutamente tal hipótesis. El corajudo comportamiento de Matilde durante la dictadura bastaría para desmentirla”. Desde Cerdeña, Loyola expresa su coincidencia con la opinión de la fundación Pablo Neruda, que custodia el legado del poeta y de la que están excluidos los familiares y el Partido Comunista. Consultado por Tiempo, el director ejecutivo de la fundación, Fernando Sáez, rechaza hacer declaraciones y se remite a un comunicado que sostiene que “no existe evidencia alguna ni pruebas de ninguna naturaleza que indiquen que Pablo Neruda haya muerto por una causa distinta del cáncer avanzado que lo aquejaba desde hacía tiempo”.

Deuda con Neruda.

Tras conocer la denuncia de Manuel Araya en la revista mexicana Proceso, el 31 de mayo, el Partido Comunista presentó una querella criminal. Entre sus primeras decisiones, Mario Carroza, quien ya ordenó en mayo la exhumación y la nueva autopsia de los restos del presidente Allende, ha demandado los antecedentes médicos de Neruda y ha pedido a la Brigada de Derechos Humanos de la Policía de Investigaciones que interrogue a Araya antes de citarle a declarar.

Por su parte, uno de los abogados del PCCh, Eduardo Contreras, adelanta la actuación de la acusación: “Dentro de algunas semanas solicitaremos la exhumación para ver si aún es posible determinar si la sustancia que le inyectaron era un calmante o era venenosa. Está claro que no murió de cáncer, sino debido al paro cardíaco que le provocó una inyección”. Guillermo Teillier, presidente del Partido Comunista y diputado, destaca que “en el exilio Neruda hubiera sido un enemigo formidable, y sabemos que Pinochet ordenó posteriormente el asesinato de las personalidades chilenas que denunciaban su régimen. Y recordemos que Eduardo Frei Montalva (presidente entre 1964 y 1970) fue asesinado en la clínica Santa María en 1982 por agentes de la dictadura, como probó el juez Alejandro Madrid hace unos años tras exhumar su cadáver”.

También Rodolfo Reyes, abogado, representante legal de los herederos del poeta y uno de sus cuatro sobrinos consanguíneos, cree necesaria esta investigación judicial y anticipa que autorizará la exhumación si el juez la solicita: “Es preferible que se sepa la verdad, tenemos una deuda con Neruda: averiguar si fue asesinado o murió a consecuencia de la enfermedad”. En septiembre de 1973 tenía 22 años y recuerda que ninguno de los familiares “esperaba su fallecimiento”. “En julio le había visitado en Isla Negra por su cumpleaños. Le encontré bien, usaba bastón para caminar por un dolor en la rodilla, pero tenía buen aspecto. Nunca imaginamos que pudiera haber sido asesinado, pero durante la dictadura cualquier cosa era posible”.

A la Justicia corresponde ahora establecer las causas de la muerte de Pablo Neruda. Mientras tanto, sus compañeros recordaron el 10 de julio en Isla Negra su nacimiento hace 107 años y depositaron flores rojas en su tumba, situada en un promontorio que mira hacia la inmensidad del océano, donde descansa junto a Matilde Urrutia, como pidió en su poema Disposiciones del poemario Canto General.