Citation de Pablo Neruda

mardi 24 septembre 2013

CHILI : 40 ANS APRÈS LA MORT DE PABLO NERUDA

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LE PHOTOGRAPHE BRÉSILIEN EVANDRO TEIXEIRA A COUVERT SECRÈTEMENT LA MORT DE NERUDA. IL A PU S'INTRODUIRE À LA CLINIQUE « SANTA MARIA », EN CACHANT SON APPAREIL PHOTO « LEICA » SOUS SA CHEMISE.  PHOTO EVANDRO TEIXEIRA

À l’époque, une version officielle fut fournie très vite aux medias : le poète est décédé de mort naturelle, emporté par le cancer. Mais tout aussi vite, certains amis de l'artiste ont démenti cette version.
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LA MISE EN BIÈRE DE PABLO NERUDA EN
SEPTEMBRE 1973, DANS UN COULOIR DE LA
MORGUE À LA CLINIQUE « 
SANTA MARIA »
À SANTIAGO. PHOTO EVANDRO TEXEIRA
Deux témoignages sortent du lot. D'abord celui de Manuel Araya, ancien chauffeur et assistant du Nobel chilien qui conteste la version officielle et dénonce une « mort induite ».  Selon lui, le poète a été hospitalisé quelques heures avant sa mort et a reçu une injection dissimulée, autrement dit, il a été  empoisonné. Un deuxième témoignage, celui de l'ambassadeur du Mexique au Chili, Gonzalo Martinez, qui a vu Neruda juste avant sa mort, va dans le même sens. Il confirme que le poète était malade, mais sûrement pas à l'agonie. L'ambassadeur Martinez avait préparé la sortie du Chili de Neruda. Le président mexicain de l'époque, Luis Echeverria, avait mis à sa disposition un avion, pour permettre au poète de quitter plus aisément le pays pour Mexico, le 24 septembre 1973. Neruda est mort quelques heures avant ce voyage. 


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L’EXHUMATION DES RESTES DU POÈTE PABLO NERUDA A COMMENCÉ LUNDI 8 AVRIL 2013 À ISLA NEGRA, SUR LA CÔTE CENTRALE DU CHILI. LA JUSTICE VEUT DÉTERMINER SI LE POÈTE, DÉCÉDÉ EN 1973 PEU APRÈS LE COUP D'ETAT DE PINOCHET, EST BIEN MORT D'UN CANCER COMME LE VEUT LA VERSION OFFICIELLE, OU S'IL A ÉTÉ ASSASSINÉ.

L’hypothèse de l’assassinat fut démentie par la Fondation Neruda, et par certains de ses anciens amis, « On peut tuer un moribond, mais politiquement ce n'est pas intéressant » soutenait Jorge Edwards, il y a quelques jours à la radio. La version a néanmoins incité le Parti communiste chilien, dont le poète fut membre, à porter plainte en 2011.

La dépouille de l'écrivain, enterrée à Isla Negra, a été exhumée en présence d'une équipe de médecins légistes et d'experts internationaux. Les prélèvements seront ensuite analysés dans des laboratoires de trois pays et les résultats devraient être connus dans plusieurs mois.

lundi 23 septembre 2013

« PABLO NERUDA ÉTAIT UN SYMBOLE À ABATTRE »

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LE PHOTOGRAPHE BRÉSILIEN EVANDRO TEIXEIRA A COUVERT SECRÈTEMENT LA MORT DE NERUDA. IL A PU S'INTRODUIRE À LA CLINIQUE « SANTA MARIA », EN CACHANT SON APPAREIL PHOTO « LEICA » SOUS SA CHEMISE.  PHOTO EVANDRO TEIXEIRA
Nous, nous craignions pour sa vie car on le savait en danger. L’ambassadeur du Mexique voulait le faire sortir du pays. Il devait d’ailleurs s’y rendre le 24 septembre 1973. Le 22, Neruda me dit d’aller à Isla Negra pour faire ses valises et lui ramener douze livres. Lorsque nous partons avec Matilde, il va bien. Puis, dans l’après-midi, nous recevons un appel pour nous informer qu’on lui a fait une piqûre. Lorsque nous revenons à la clinique, Neruda est rouge, il me dit que tout son corps le brûle. C’est très étrange, mais on m’envoie acheter un médicament. Pourquoi, alors que nous sommes 
dans un hôpital? En sortant, deux voitures m’arrêtent et m’emmènent au commissariat. Neruda meurt le 23 septembre.

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UNE DE L'HUMANITÉ DU 12 SEPTEMBRE 1973 CONSACRÉ À LA MORT DU PRÉSIDENT SALVADOR ALLENDE   

Aujourd’hui, où en est-on désormais de l’enquête ?



Manuel Araya. Officiellement, il serait mort en état de grande faiblesse. Mais cette version est différente de celle la presse de l’époque qui parle de mort liée à une infection urinaire. Dans les années 1970, le médecin Sergio Draper a dit qu’il avait injecté la fameuse piqûre et que Neruda était mort dans ses bras. Mais, lorsqu’il a dû témoigner, il a dit qu’il n’était pas à l’hôpital. Et puis on a découvert que des médecins exerçaient également à Colonia Dignidad (une secte nazie – NDLR) et que d’autres n’existaient même pas!

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UNE DE L'HUMANITÉ DU 27 SEPTEMBRE 1973  CONSACRÉ AUX LES OBSÈQUES DU POÈTE PABLO NERUDA 


Vous dites que Pablo Neruda était en danger. Pourquoi ?



Manuel Araya. Il était surveillé en permanence. Dès le 12 septembre, un bateau militaire s’est posté au large d’Isla Negra. Des militaires sont venus une première fois dans sa maison pour savoir combien de personnes y travaillaient. Le 14 septembre d’autres militaires sont revenus, puis des marins. Notre objectif était alors d’évacuer Neruda. Il était un symbole à abattre. Il fut sénateur, candidat à la présidence, prix Nobel, communiste. Il était connu, reconnu et apprécié du peuple.


Dans le cadre de l’enquête, les restes de Neruda ont été exhumés en avril dernier pour pratiquer des examens ADN afin d’en savoir plus sur les conditions de sa mort…

Manuel Araya. Je m’en réjouis. Quarante ans après sa mort, c’est une façon de faire justice. C’est une première dans l’histoire du Chili. Mais je me méfie aussi. J’ai des doutes sur les compétences du système médico-légal chilien. Il y a eu d’autres affaires de cas de morts et de disparus qui ont montré son incompétence. Les médecins se sont trompés tant de fois, et de nombreux cas n’ont jamais été résolus.

Qu’est-ce que cela a signifié d’être un des hommes de confiance de Pablo Neruda ?

Manuel Araya. Cela a été un orgueil pour moi que de travailler pour lui à partir de 1972. Militant communiste, je l’avais connu dans les années 1950, lorsqu’il nous donnait des conférences. Puis mon Parti m’a confié la grande responsabilité de me mettre à son service. C’était un homme très agréable, fidèle en amitié. Il venait pourtant de la souffrance : il a perdu sa mère quand il était bébé, et son père a toujours été très dur avec lui. Mais il n’a jamais cessé d’aider les gens, de les écouter. Lorsqu’il se promenait dans Isla Negra, il n’hésitait pas à s’arrêter pour parler avec eux. Je regrette que mon Parti ne m’ait pas prêté attention avant. Matilde non plus ne m’a pas écouté. J’ai pourtant frappé à toutes les portes. La Fondation Pablo-Neruda m’a demandé de renoncer à dénoncer la mort de Neruda. Jamais. C’est usurper son héritage.

PABLO NERUDA, AVEC SALVADOR ALLENDE ET VICTOR JARA, LES TROIS MORTS DE SEPTEMBRE AU CHILI

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L’IMAGE DU PRÉSIDENT MARTYR SALVADOR ALLENDE ET SON LÉGAT POLITIQUE SONT RESTÉES DANS LES LUTTES DU PEUPLE. 

Morts tous les trois dans le court intervalle d’une douzaine de jours en Septembre, en plein déferlement des troupes qui en 1973 prenaient d’assaut la démocratie chilienne, ils signalent la fin d’une époque et la tragédie d’un pays, mais portent aussi les prémices d’une fervente volonté de résistance, les signaux d’un long combat quotidien pour la dignité. 

En effet, pendant la longue nuit du Chili, leurs noms ont secrètement circulé entre les barbelés, et ont été audacieusement tracés sur les murs du pays en signe de ralliement et de contestation. L’exemple héroïque de Salvador Allende, les chansons de Víctor Jara et le chant tellurique de Neruda ont accompagné chaque combat de cette longue lutte.   

Septembre d’il y a 40 ans laisse un projet collectif terrassé par les bombes et une vaste armée désarmée, vaincue par la félonie, puis martyrisée par la barbarie. Parmi des milliers d’autres victimes, nos trois morts de Septembre ont atteint le rang de symboles et jouissent d’une stature morale qui reste toujours intacte, qui va même en grandissant. Ils sont vivants et bien portants, leur prestige éclaire toujours les rangs des multitudes et les revendications des peuples.

Leur mémoire, la simple évocation de ces noms que l’on a voulu pourtant éradiquer, signifient aujourd’hui des valeurs universelles. Et une victoire permanente, écrasante et sans fin, sur les putschistes et leurs souteneurs.

vendredi 20 septembre 2013

LA LIRA POPULAR.


À partir de la décennie 1870, on voit circuler au Chili de grands feuillets de mauvais papier qui diffusent les textes des poetas populares, poètes improvisateurs, souvent illettrés, issus des couches défavorisées de la société santiaguina. Vendues cinq centavos dans les rues, les gares, les marchés, ces feuilles constituent un témoignage rare de la culture populaire de la fin du XIXe siècle. 

Les verseros qui vendaient ces feuilles installaient généralement une corde entre poteaux ou arbres et y pendaient leurs feuilles et libelles. La pratique est ancienne et attestée à l’époque moderne en Europe, et donne son nom au genre, la « littérature de cordel». Moins étudiée que son équivalent brésilien, moins connue que l’œuvre de José Guadalupe Posada, graveur mexicain dont les calaveras (« crânes ») ornent jusqu’à nos t-shirts, la littérature de cordel chilienne bénéficie ces dernières années d’un regain d’intérêt qui devrait à terme lui assurer un statut de patrimoine iconographique national.