samedi 1 décembre 2007

TINA MODOTTI EST MORTE



Tina Modotti, ma sœur, tu ne dors pas, non, tu ne dors pas:

peut-être ton cœur entend-il éclore la rose

d'hier, la dernière rose d'hier, la rose nouvelle.

Repose doucement, ma sœur.

La rose nouvelle est à toi, la terre nouvelle est à toi:

tu as mis une nouvelle robe de semence profonde

et ton doux silence s'emplit de racines.

Tu ne dormiras pas en vain, ma sœur.

Pur est ton doux nom, pure est ta fragile vie.

D'abeille, d'ombre, de feu, de neige, de silence, d'écume,

d'acier, de contour, de pollen, a été construit ton inflexible,

ton doux profil.

Le chacal sur le diamant de ton corps endormi

montre encore la plume et l'âme ensanglantée

comme si tu pouvais, ma sœur, te lever,

en souriant sur la boue.

Dans ma patrie je t'emmène pour qu'on ne te touche pas,

dans ma patrie de neige afin que ni l'assassin,

ni le chacal, ni le traître ne touche à ta pureté :

là tu seras tranquille.

Entends-tu un pas, un pas plein de plein pas, quelque chose

de grand qui vient de la steppe, du Don, du froid?

Entends-tu un pas résolu d'un soldat dans la neige ?

Ma sœur ce sont tes pas.

Ils passeront un jour devant ta petite tombe

avant que les roses d'hier ne soient détruites,

ceux d'un jour passeront, demain,

où brûle ton silence.
Un monde est en marche vers le lieu où tu al allais, ma

sœur.

Les chants de ta bouche avancent chaque jour

dans la bouche du peuple glorieux que tu aimais.

Ton coeur était courageux.

Dans les vieilles cuisines de ta patrie, sur les route

poussiéreuses, quelque chose se dit et arrive,

quelque chose revient dans la flamme de ton peuple doré,

quelque chose s'éveille et chante.

Ce sont les tiens, ma sœur : ceux qui aujourd'hui disent

ton nom,

ceux qui de toutes parts, de l'eau et de la terre,

taisent et disent avec ton nom d'autres noms.

Car le feu ne meurt pas.



MAINS SUR UN OUTIL, 1927. PHOTO DE TINA MODOTTI
 




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