Citation de Pablo Neruda

lundi 8 novembre 2010

Dámaso Alonso (1898-1990)

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LE POÈTE ESPAGNOL DÁMASO ALONSO


Poète espagnol, Alonso appartient à la fameuse «génération de 1927 » qui, autour de Federico García Lorca, Jorge Guillén, Vicente Aleixandre, regroupe notamment Pedro Salinas, Rafael Alberti, Emilio Prados, Luis Cernuda, Manuel Altolaguirre, Gerardo Diego. Alonso est aussi l'un des critiques littéraires les plus renommés de l'Espagne actuelle et le fondateur d'une nouvelle école d'analyse stylistique. Né à Madrid le 22 octobre 1898, c'est d'abord vers les études scientifiques qu'il s'oriente. Il en gardera la rigueur, la précision et la clarté qui caractérisent ses études de philologie et de littérature. Dès 1923, il collabore à la Revista de filología española et au Centro de estudios históricos dirigé par Ramón Menéndez Pidal. Il fréquente aussi les milieux littéraires. En 1927, il célèbre, avec d'autres poètes, le tricentenaire de la mort de Góngora. Sa thèse sur la langue poétique de Góngora lui vaut, la même année, le Prix national de littérature. Ses éditions et ses commentaires des Soledades et du Polifermo, ainsi que ses nombreuses études sur le grand poète baroque, sont accueillis avec admiration et acquièrent aussitôt une autorité incontestée. En 1933, il obtient une chaire à l'université de Valence. En 1939, il succède à Ramón Menéndez Pidal à la chaire de philologie romane de l'université de Madrid. Ses travaux de critique et d'érudition se succèdent à un rythme rapide, sur Érasme, Gil Vicente, Bécquer, Carrillo de Sotomayor ou fray Luis de León. En 1942 paraît une étude admirable sur La Poesía de san Juan de la Cruz, suivie en 1948 de Vida y obra de Medrano (le tome II paraîtra en 1958). Publié en 1950, Poesía española : ensayo de métodos y límites estilísticos établit nettement les principes sur lesquels l'auteur fonde sa méthode d'analyse littéraire : rôle primordial de l'intuition, recours immédiat aux textes, examen rigoureux de la matière verbale (style, rythme, tons, lexique, référents, variantes, métaphores...) pour mieux comprendre la signification à quoi tout est subordonné : le message transmis directement d'une conscience à une autre conscience, de l'auteur au lecteur. Le style même du critique doit participer à cette transmission du message en se mettant, pour ainsi dire, en résonance avec lui. Membre de la Real Academia de la historia, directeur (depuis 1968) de la Real Academia de la lengua, directeur du département de philologie du Consejo superior de investigaciones científicas, docteur honoris causa de plusieurs universités d'Europe et d'Amérique, Dámaso Alonso voit son audience s'élargir à l'étranger, où il donne de nombreuses conférences. Son œuvre critique s'enrichit sans cesse : Poetas españoles contemporáneos (1952), Menéndez Pelayo crítico literario : las palinodias de don Marcelino (1956), De los siglos oscuros al de oro (1958), Cuatro poetas españoles : Garcilaso, Góngora, Maragall, Antonio Machado (1962), Del siglo de oro a este siglo de siglas (1962), En torno a Lope (1972). Si l'œuvre savante de Dámaso Alonso est extrêmement abondante, il n'en est pas de même de son œuvre poétique. Poemas puros, poemillas de la ciudad (1921) offre déjà le contraste entre une vision idéalisée et une vision désabusée de l'existence qui caractérise toute sa poésie, où il passe souvent une note sarcastique.

Oscura noticia (1944) reprend avec plus d'insistance les thèmes du temps, de l'amour et de la mort dans une tonalité d'angoisse souvent déjouée par la dérision d'un humour grinçant. Le langage poétique, évitant toujours le sentimentalisme ou l'anecdote, mêle avec bonheur métaphores et symboles selon l'esthétique épurée de la «génération de 1927 », héritière, en rupture de ban, du modernisme de Rubén Darío. Publié aussi en 1944, Hijos de la ira (Fils de la colère) traduit, avec plus de révolte et d'indignation devant le mal et l'injustice, une vision tragique et angoissée du monde. Des images exacerbées, un ton de violence, des rythmes haletants expriment l'horreur d'un pays déchiré jusqu'au cœur par la guerre civile. Le poème Insomnio, qui ouvre le livre, est resté célèbre par cette prise en considération brutale et impitoyable des circonstances immédiates. La poésie soudain descend dans la rue : « Madrid est une ville de plus d'un million de cadavres (selon les dernières statistiques). / Parfois, la nuit, je me retourne et me redresse dans cette niche, où, depuis quarante-cinq ans, je pourris, / et où je passe de longues heures à entendre gémir l'ouragan, ou aboyer les chiens, ou bien doucement s'écouler la lumière de la lune. / Et je passe de longues heures à gémir comme l'ouragan... »


La guerre civile, la guerre mondiale, le chaos du monde ont changé désormais la sensibilité du poète. « Je cherchais, dira-t-il à propos de ce livre, une expression pour émouvoir le cœur et l'intelligence des hommes, et non pas les derniers raffinements pour minorités exquises. » Hijos de la ira marque, dans l'évolution de la poésie espagnole au XXe siècle, un tournant décisif. Les thèmes, le vocabulaire, le ton, les sentiments, tout s'appliquera dorénavant aux problèmes les plus urgents, quotidiens, religieux, politiques ou existentiels, tout en revendiquant, devant le désordre du monde et ses aberrations sanglantes, la dignité et la valeur de l'homme. Hombre y Dios (1955) met l'accent davantage sur les préoccupations religieuses, tandis que Gozos de la vista (1955-1956) exalte, avec plus d'insistance, à travers le sens de la vue, la beauté des choses et leur précarité tragique. Sous ces diverses modalités, l'ensemble de la poésie de Dámaso Alonso est traversé par une inquiétude d'ordre métaphysique devant l'ultime réalité, toujours pressentie sous l'apparence innombrable. En 1978, Dámaso Alonso obtint le « premio Cervantes », la plus haute distinction littéraire espagnole.
La guerre civile, la guerre mondiale, le chaos du monde ont changé désormais la sensibilité du poète. « Je cherchais, dira-t-il à propos de ce livre, une expression pour émouvoir le cœur et l'intelligence des hommes, et non pas les derniers raffinements pour minorités exquises. » Hijos de la ira marque, dans l'évolution de la poésie espagnole au XXe siècle, un tournant décisif. Les thèmes, le vocabulaire, le ton, les sentiments, tout s'appliquera dorénavant aux problèmes les plus urgents, quotidiens, religieux, politiques ou existentiels, tout en revendiquant, devant le désordre du monde et ses aberrations sanglantes, la dignité et la valeur de l'homme. Hombre y Dios (1955) met l'accent davantage sur les préoccupations religieuses, tandis que Gozos de la vista (1955-1956) exalte, avec plus d'insistance, à travers le sens de la vue, la beauté des choses et leur précarité tragique. Sous ces diverses modalités, l'ensemble de la poésie de Dámaso Alonso est traversé par une inquiétude d'ordre métaphysique devant l'ultime réalité, toujours pressentie sous l'apparence innombrable. En 1978, Dámaso Alonso obtint le « premio Cervantes », la plus haute distinction littéraire espagnole.


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