Citation de Pablo Neruda

vendredi 14 novembre 2014

jeudi 13 novembre 2014

BEIJING, CHINE : INAUGURATION D’UN BUSTE DE PABLO NERUDA

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LA PRÉSIDENTE MICHELLE BACHELET A RENDU HOMMAGE À PABLO NERUDA À BEIJING. PPHOTO JOSÉ MANUEL DE LA MAZA
L'événement s'est déroulé en présence de nombreux invités, notamment celle  du créateur de l'œuvre, l'éminent artiste chinois Yuan Xikun. La Présidente a rappelé que Neruda « a été un grand admirateur de la Chine. Il a séjourné ici en 1928, 1951 et 1957. Sur sa navigation sur le fleuve Yangzi Jiang, dans au cours de sa dernière visite il a écrit : 'Il y a peu de paysages dans la terre d’une beauté si écrasante' ». La chef d'État a souligné que Neruda «fut un homme de son temps, sensible à la beauté, à la majesté des fleuves et des montagnes, mais aussi aux grandes transformations humaines de son époque. Et l'une de ces transformations fut, sans doute, celle de la Chine».

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LA GRANDE MURAILLE DE CHINE EST SANS CONTESTE UNE DES CONSTRUCTIONS LES PLUS IMPRESSIONNANTES DE L'HUMANITÉ,  PABLO NERUDA 1957.
Avec l'ancien Président de la République, Salvador Allende et le peintre José Venturelli, Pablo Neruda a été l'un des membres fondateurs, en 1952, de l'Institut Chilien-Chinois de Culture, que pendant plus de soixante ans a développé un actif travail de promotion de la culture et des arts au Chili et a servi d'espace de rencontre de remarquables personnalités littéraires et artistiques des deux pays.

mardi 14 octobre 2014

ARTHUR RIMBAUD : LE POÈTE « VOYANT »

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1854 -20 OCTOBRE- 2014

LE 160 ÈME ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DU POÈTE ARTHUR RIMBAUD.

vendredi 19 septembre 2014

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FUNÉRAILLES SURVEILLÉES


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PHOTO EVANDRO TEXEIRA
«S'il vous plaît, plus de photos », a demandé Matilde. Les flashes mitraillaient avec insistance le corps sans vie du poète, en projetant une lumière clignotant dans ce couloir obscur de la Clinique Santa María. C'était le matin du 24 septembre 1973. La nuit précédente, à dix heures passées, Neruda était mort en prononçant -dans un délire bouleversant- ses derniers mots : « Ils sont en train de les fusiller! Ils sont en train de les fusiller! » .

Les photographes n'ont pas fait grand cas du désir de la veuve, et ils se sont obstinés dans l'éclair de leurs appareils photographiques. Avec la presse, une vingtaine d'amis intimes se pressaient aux côtés de Matilde. Le corps fut mis dans un cercueil gris qui est arrivé peu après. Francisco Coloane a fini de boutonner la chemise, ils refermèrent le cercueil et le cortège se dirigea à La Chascona (maison du poète à Santiago), sur le flanc de la colline San Cristóbal.


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LE CORTÈGE SE DIRIGEA À LA CHASCONA 
(MAISON DU POÈTE À SANTIAGO), SUR LE 
FLANC DE LA COLLINE SAN CRISTÓBAL. 
PHOTO EVANDRO TEIXEIRA
Par œuvre des militaires, La Chascona était un désastre : tableaux déchirés, livres à demi brûlés, partout des objets brisés, les rideaux et le téléphone avaient été arrachés. On entrait en marchant sur des morceaux verres. Non contents de la fouille pratiquée, ils avaient dévié un canal qui passait par le coteau en le dirigeant directement sur la maison. La boue s'accumulait sur le plancher, il n'y avait pas de lumière électrique, et un air froid se glissait par les fenêtres brisées.


Quelqu'un a proposé de conduire le cercueil à la Société d'Écrivains. « Pablo a voulu être transporté chez lui. Nous ne l’emmèneront nulle part ailleurs », a prévenu Matilde.

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AU CIMETIÈRE, IL Y EUT DES DISCOURS, 
DES POÈMES EN HOMMAGE À NERUDA, DE
 VAGUES MÉTAPHORES EXIGÉES PAR LA 
PRÉCAUTION DE NE PAS DIRE CE QU’ON 
AURAIT PRÉFÉRÉ CRIER. ILS PLACÈRENT 
LE CERCUEIL DANS LE MAUSOLÉE, ET LE 
COUVRIRENT DE FLEURS.  
PHOTO EVANDRO TEIXEIRA
Les gens ont commencé à arriver. Les premiers furent les ouvriers de Quimantú qui venaient ce jour d'être licenciés, et ils avaient voulu accompagner le cercueil : ils se postèrent près de la caisse et lui ont fait une garde d'honneur. Les missions diplomatiques sont alors arrivées, et la première couronne est apparue, «Au grand poète Pablo Neruda, Prix Nobel. Gustavo Adolfo, Roi de la Suède». L'ambassadeur suédois s’emportait, tandis qu'il interpelait les photographes: «Prenez des photos, des photos, des photos, c'est la preuve la plus évidente de la sauvagerie de ces gens!». Les ambassadeurs de la France et du Mexique sautaient entre les flaques de boue pour arriver au living.

Portant des lunettes sombres, et vêtu d’un manteau noir rigoureux, dans un coin était Alone, le critique littéraire qui n'avait pas économisé des mots pour exiger, depuis sa tribune dans El Mercurio, le coup d'État. Ils sont aussi apparus, quelques représentants de la Junte Militaire que Matilde n'a pas voulu recevoir. Beaucoup d'amis de Neruda étaient là bien tout en étant conscients du risque qu'ils couraient.


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IL Y A EU DES GENS COURAGEUX POUR L’ACCOMPAGNER JUSQU’AU BOUT DE SON VOYAGE EN CHANTANT L’INTERNATIONALE ET CECI : « PABLO NERUDA, PRÉSENT MAINTENANT ET TOUJOURS/ SALVADOR ALLENDE, PRÉSENT MAINTENANT ET TOUJOURS/ VICTOR JARA, PRÉSENT MAINTENANT ET TOUJOURS. »  PHOTO EVANDRO TEIXEIRA

Le mardi 25, à neuf heures du matin, ils sortirent la caisse en traversant l'eau et la boue qui inondait l'entrée et le rez-de-chaussée. Les journalistes étrangers qui arrivaient pour couvrir les obsèques de Neruda étaient consternés devant la scène. Dehors, dans la rue, un groupe d'ouvriers et d'étudiants s'était déjà formé. les premiers cris commençaient à se faire entendre, défiant l’œil vigilant des militaires postés sur les trottoirs, et donneraient ce matin-là le ton de protestation au cortège funèbre : « Camarade Pablo Neruda! », et la réponse en choeur : « Présent! ».


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QUATORZE JOURS APRÈS LE PUTSCH DE PINOCHET, LE CORTÈGE FUNÉRAIRE DE PABLO NERUDA A ÉTÉ LE PREMIER ACTE DE RÉBELLION OUVERTE CONTRE LA DICTATURE. PHOTO EVANDRO TEIXEIRA

Probablement, le Registre le plus complet de ce tragique événement (avec les images gravées par Patricio Guzmán ce jour là dans le celluloïd de « La bataille du Chili »), sans doute a-t-il été rassemblé par le journaliste Sergio Villegas en un texte court, « Funérailles surveillées », qui a presque 25 ans, et qui est réédité au Chili (le Comité Pour Retour d'Exilés a fait une petite édition de cinquante pages en 1984). Il fut publié pour la première fois en 1978, dans le troisième numéro de la revue Araucaria, que Volodia Teitelboim et Carlos Orellana dirigeaient et éditaient depuis Madrid. Le texte a été traduit dans plusieurs langues, adapté pour la radio, et repris dans grand nombre d'oeuvres anthologiques.


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MALGRÉ LA PEUR LES GENS SONT SORTIS DIRE AU REVOIR À NERUDA, CE MATIN TIÈDEMENT ENSOLEILLÉ. RUE PURÍSIMA, FLEUVE MAPOCHO, AVENUE LA PAZ. FACE À UNE CENTRALE ÉLECTRIQUE, LES MILITAIRES DE L’ARMÉE CHILIENNE VISAIENT LE CORTÈGE. PHOTO EVANDRO TEIXEIRA


« Funérailles surveillées » conserve cette fraîcheur de ton dramatique que Villegas a atteint en recueillant des fragments de témoignages d’amis proches du poète, et qui furent des témoins directs de ces funérailles pleines de rage, un événement que beaucoup ne tarderont pas à considérer comme la première manifestation de rébellion contre la dictature. Tout juste mentionnés par un de leurs noms (Aída, Luis Alberto, Bello, Loyola), comme si c’était l’histoire en elle-même -et non ceux qui la disent- qui a en réalité de l’importance, les témoins superposent leurs voix et reconstituent une mémoire pleine d’affection, dramatique, mais avant tout collective.

« Funérailles surveillées » est aussi un témoignage de la résistance dans l’exil. A ce texte qui raconte les funérailles de Neruda s’ajoute un autre, tout aussi court, «Armée nocturne», écrit en 1983. Il relate une autre histoire d’opiniâtretés et d’obstinations, celle de Radio Berlin, et celle des ces programmes qui, par onde courte, dévoilait au monde entier les atrocités de la dictature. Tout comme Volodia sur Radio Moscou, Sergio Villegas depuis Berlin était la voix qui venait de loin raconter ce qui se passait à l’intérieur, qui recueillait les témoignages des exilés, des intellectuels latino-américains et européens contre le régime, qui rendait compte chaque soir des sessions de la Commission d’Investigation des crimes de la junte militaire mise en place par les Nations Unies, initiative inédite que l’organisme international n’avait entrepris avec aucun autre pays. C’était l’époque où un grand nombre de personnes prit l’habitude de se régler sur la fréquence et de chercher les décharges nocturnes de vérité qui venaient, par onde courte, depuis l’autre bout du monde. Malgré la peur.


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LE 23 SEPTEMBRE 1973, SOUS L’ÉTAT DE SIÈGE, LE CERCUEIL DE PABLO NERUDA RECOUVERT DU DRAPEAU NATIONAL EST CONDUIT AU CIMETIÈRE PARA SA VEUVE ET QUELQUES PROCHES, ACCOMPAGNÉS PAR DES CENTAINES D’ANONYMES. LA DICTATURE DE PINOCHET S’INSTALLAIT AU CHILI À FEU ET À SANG, ET LES FUNÉRAILLES DU PRIX NOBEL ONT ÉTÉ LA PREMIÈRE MANIFESTATION PUBLIQUE CONTRE LE CRUEL RÉGIME MILITAIRE. PHOTO EVANDRO TEIXEIRA

Et c’est également malgré la peur que les gens sont sortis dire au revoir à Neruda, ce matin tièdement ensoleillé. Rue Purísima, Fleuve Mapocho, Avenue La Paz. Face à une centrale électrique, les bérets noirs de l’armée visaient le cortège. Les gens se resserraient. Par moment, quelqu’un, un livre à la main, récitait des vers du poète :

Chacals que le chacal repousserait,
pierres que le dur chardon mordrait en crachant,
vipères que les vipères détesteraient !

Au cimetière, il y eut des discours, des poèmes en hommage à Neruda, de vagues métaphores exigées par la précaution de ne pas dire ce qu’on aurait préféré crier. Ils placèrent le cercueil dans le mausolée, et le couvrirent de fleurs. Il restait encore à limiter les risques de la sortie. Des rumeurs circulaient. « Ils arrêtent des gens dehors », quelqu’un a dit. « Sors par derrière », conseillait un autre. À l’entrée du cimetière se tenaient les militaires, ils regardèrent les gens sortir, vigilants, sans bouger.

mercredi 3 septembre 2014

UN BATEAU DE RÉFUGIÉS CÉLÉBRÉ AU CHILI

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TABLEAU DU « WINNIPEG » QUI ORNAIT LA CABINE DU CAPITAINE GABRIEL PUPIN, OFFERT PAR CELUI-CI, À LA FAMILLE DE VÍCTOR PEY, PASSAGERS DU « BATEAU DE L'ESPOIR » 
Le voyage dure exactement 30 jours. Dans le bateau, de 4.500 tonnes, les cales sont aménagées avec des matelas pour faire dormir les réfugiés. Une cale sert de cantine. 
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LE WINNIPEG TRAVERSE LE LAC GATÚN
ZONE CANAL PANAMA AOUT 1939
Le Winnipeg touche finalement terre de l'autre côté de l'Atlantique le 3 septembre 1939. Le bateau, lui, eut moins de chance: alors que la Seconde guerre mondiale éclatait, il fut détruit par l'armée nazie, selon l'historien espagnol Mario Amoros.

LE CHILI CÉLÈBRE L'ARRIVÉE DU WINNIPEG, BATEAU AFFRÊTÉ PAR PABLO NERUDA


Ce fut seulement une fois arrivé à Paris, explique-t-il à l'AFP, dans une France pas encore tout à fait en guerre, qu'il lut dans le journal que le consul pour l'immigration espagnole Pablo Neruda organisait des entretiens au consulat. Ceux-ci impliquaient des réfugiés espagnols dans l'optique de les emmener de l'autre côté de l'Atlantique, au Chili.


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L'ARRIVÉE DU WINNIPEG À VALPARAISO
 BIBLIOTECA NACIONAL DE CHILE

Victor Pey s'est alors retrouvé face au poète qui prenait ses notes dans un carnet : « J'ai cru que c'était perdu d'avance, parce que l'entretien avec Neruda n'a pas été très chaleureux, mais au bout de dix jours j'ai reçu un avis nous demandant d'embarquer immédiatement sur le Winnipeg, à Trompeloup (Gironde). »

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RÉFUGIÉS ESPAGNOLS DANS LE  BATEAU WINNIPEG  DANS
LE PORT DE TROMPELOUP PRÈS DE BORDEAUX, 1939.
  PHOTO IONE ROBINSON     
 
Mercedes Corbato, également du voyage, se rappelle que le voyage s'est organisé alors que ces réfugiés n'avaient pas d'autorisation pour vivre en France. Leur crainte était d'être déportés. Pour elle et les quelques 2.200 pêcheurs, paysans, ouvriers, intellectuels, anciens militaires, et jeunes enfants, « cela a été un grand bonheur de pouvoir monter dans ce bateau, qui allait nous amener vers la liberté ».

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L'ARRIVÉE DES RÉFUGIÉS ESPAGNOLS
À VALPARAISO
Pour atteindre cette liberté, il aura fallu 30 jours de voyage. Dans l'embarcation de 4.500 tonnes, les cales ont été aménagées avec des matelas ainsi qu'une cantine. Et le 3 septembre 1939, le Winnipeg arrivait finalement à bon port. Même si l'embarcation allait être détruite par l'armée nazie lorsque la Seconde Guerre mondiale éclata, selon l'historien espagnol Mario Amoros.

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JEUNE PASSAGÈRE DU BATEAU WINNIPEG  
DANS LE PORT DE TROMPELOUP,  1939.
PHOTO  PHOTO IONE ROBINSON     
 
Victor Pey raconte que les réfugiés sont « arrivés à la tombée de la nuit au port de Valparaiso, et, la première chose que l'on a vue, c'était très joli, les collines de Valparaiso toutes illuminées. Le jour suivant, la majorité des voyageurs a pris un train pour Santiago, la capitale, où une foule de gens nous a reçus avec beaucoup de tendresse ». Une grande partie d'entre eux aurait alors trouvé du travail rapidement.

Mais si certains allaient finir leur vie au Chili, d'autres dûrent fuir encore. Car avec le coup d'Etat d'Augusto Pinochet, en septembre 1973, certains sympathisants de la gauche déchue de Salvador Allende se sont à nouveau exilés. Dans ses mémoires, Pablo Neruda évoque cet épisode humanitaire comme « la plus noble mission accomplie dans ma vie ». Pour Victor Pey, c'est aussi « ce qui a permis que je garde ma vie, mon travail et ma dignité ».

mardi 2 septembre 2014

BIENVENU PABLO NERUDA

LA COPIE D'UN VIEUX JOURNAL AVEC LE POÈTE LAURÉAT DU PRIX NOBEL PABLO NERUDA, VU DANS SA MAISON DE SANTIAGO DU CHILI, LE VENDREDI 8 NOVEMBRE 2013. PHOTO LUIS ANDRES HENAO

jeudi 21 août 2014

CANTO A BERNARDO O´HIGGINS

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« CANTO A BERNARDO O´HIGGINS » 
TEXTE PABLO NERUDA, 
MUSIQUE VICENTE BIANCHI.
 DURÉE : 00:03:56 
  
Quien será ese hombre tranquilo
sencillo como un sendero
valiente como ninguno
Bernardo te llamaremos

Solo Bernardo te llamas
hijo del campo y del pueblo
niño triste, roble solo
lámpara de Chillan viejo
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PORTRAIT DE BERNARDO O'HIGGINS RIQUELME
À LONDRES (1798), AUTEUR ANONYME

Estribillo:
Pero la patria te llama y vienes
y se despliega tu nombre
Bernardo O'Higgins Riquelme
como si fuera una bandera
al viento de las batallas
y en primavera
al viento de las batallas
y en primavera

O'Higgins nos enseñaste
y nos sigues enseñando
que patria sin libertad
es pan, pero pan amargo

De ti heredamos la lucha
orgullo de los chilenos
tu corazón encendido
seguirá combatiendo

Estribillo:
Pero la patria te llama y vienes
y se despliega tu nombre
Bernardo O'Higgins Riquelme
como si fuera una bandera
al viento de las batallas
y en primavera
al viento de las batallas
y en primavera.


EN ESPAGNE, LE JUGE GARZON ORDONNE L'OUVERTURE DE LA FOSSE OÙ SE TROUVENT LES RESTES DE GARCIA LORCA

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LAURA GARCÍA LORCA, NIÈCE DU POÈTE.
PHOTO GORKA LEJARCEGI
 
Après s'être déclaré compétent pour enquêter sur les "disparus" du franquisme, le juge espagnol Baltasar Garzon, de l'Audience nationale, la plus haute autorité pénale du pays, a ordonné, jeudi 16 octobre, l'ouverture de plusieurs fosses communes, dont celle où se trouvent les restes du poète Federico Garcia Lorca, entre les bourgs d'Alfacar et de Viznar, près de Grenade (sud de l'Espagne).
Le Monde.fr DU   16.10.2008  avec AFP
la famille de Garcia Lorca s'était toujours opposée à l'ouverture de cette fosse qui contient également les restes de deux toreros anarchistes. Mais elle avait annoncé, en septembre, au quotidien El Pais, qu'elle ne s'opposerait pas finalement à l'ouverture de la fosse commune. "Même si nous aimerions que cela ne se fasse pas, nous respectons le désir des autres parties impliquées", avait déclaré Laura Garcia Lorca, nièce du poète et porte-parole de la famille.

Le juge Garzon a également décidé d'autoriser l'exhumation de la dépouille mortelle du maître d'école Dioscoro Galindo exécuté en 1936, près de Grenade, par des franquistes en même temps que le poète. 

LA FOSSE D’ALFACAR, À GRENADE, NE RENFERME PAS LA DÉPOUILLE DE FEDERICO GARCÍA LORCA…

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Après 51 jours de fouilles, les archéologues espagnols de l’Université de Grenade  viennent d’annoncer leur conclusion : la fosse d'Alfacar où devait se trouver la dépouille du poète assassiné en 1936 Federico García Lorca est vide.
par Michel PORCHERON du 22/12/2009
en rendant publics les résultats des recherches, le directeur des fouilles Francisco Carrion Mendez a affirmé qu'il n'y avait : « pas un seul os, pas un seul fragment d'os aussi petit soit-il, pas un seul débris dentaire(…) La terre a pourtant été passée au peigne fin partout où cela a été possible.». « Aucun reste de vêtement, aucune douille de balle », a précisé Mme Begoña Alvarez,  responsable de la justice pour l'autorité régionale d'Andalousie, chargée de ces recherches, lors de la présentation du "Rapport préliminaire nº2 sur les excavations" présenté à la presse le 18 décembre à Grenade.

Le célèbre poète espagnol n'est donc pas enterré là où l'affirmaient les historiens, tout particulièrement Ian Gibson. Ni García Lorca, ni personne d'autre, n'a été inhumé sur le site. Une page de la légende est tournée. S’ouvre celle d’un mystère. 

Fusillé à Alfacar         

Depuis des décennies, la fosse d'Alfacar en effet fut désignée par plusieurs témoignages et nombreux historiens, le lieu où ont été fusillés par des franquistes puis enterrés, Federico García Lorca (1898-1936), deux anarchistes Francisco Galadi et Joaquin Arcollas et un maître d’école, Dioscoro Galindo, en août 1936, un mois après le début de la guerre civile (1936-1939). Cette zone est devenue lieu de pèlerinage, où aujourd'hui un parc portant le nom de Federico García Lorca et un monolithe rappellent la tragédie.

Pour autant, il n'est pas remis en doute que le poète aurait été fusillé dans ce lieu. Selon le quotidien espagnol El País,  le fait que le poète ait été assassiné en cet endroit précis, « n'admet aucune discussion ».

Les recherches devraient se poursuivre, les familles des autres hommes inhumés avec F. García Lorca ne désespérant pas par ailleurs de trouver les dépouilles de leurs aïeux.

Deux hypothèses peuvent être désormais émises: García Lorca a bien été enterré là mais ses restes ont été ensuite transférés ailleurs ou bien le poète n'a jamais été inhumé à Alfacar, selon le quotidien El Pais.

Les fouilles ont eu lieu à l'endroit où Manuel Castilla, qui a affirmé  avoir participé à l'inhumation du Républicain, avait conduit en 1966 l'écrivain irlandais, naturalisé espagnol, Ian Gibson, considéré comme le biographe « officiel » du poète espagnol. D'après un livre récent de l'écrivain espagnol Gabriel Pozo, Lorca, el ultimo paseo, fondé sur des conversations avec la fille de l'homme qui avait arrêté García Lorca, Castilla a peut-être tout simplement induit Gibson en erreur, rapporte une dépêche de Reuters.   

Les fouilles ont porté  sur une superficie de 276,75 m² et il a été extrait au total 75,76 mètres cubes de sédiments. Les archéologues ont conclu dans leur rapport qu'il n'y avait jamais eu ici de fosse commune ni aucun reste humain.

Reprendre tout à zéro

De plus,  Begoña  Álvarez, a expliqué que les fouilles ont mis en évidence que sur cette la zone « il n'y a jamais eu d'inhumation ». Elle a expliqué que la distance entre la surface et la roche était de seulement 40 centimètres. Or, selon elle il faudrait au moins un mètre et demi pour faire une fosse. Ainsi cette conclusion exclurait la première hypothèse émise par El País.

L'ARMH (association pour la récupération de la mémoire historique) ne compte pas en rester là non plus, même si elle se trouve devant « un défi : reprendre les investigations à zéro ».

Les travaux menés par  l’équipe de Francisco Carrion du département de Préhistoire et d'Archéologie de l'Université de Grenade avaient commencé le jeudi 29 octobre. Depuis la veille, on pouvait voir des clôtures et des bâches ainsi que des gardes présents la nuit présents pour empêcher  l'accès à la fosse.  Des mesures qui avaient été prises essentiellement pour rassurer la famille du poète. En effet, celle-ci s'était opposée jusqu'aux derniers instants à l'ouverture de la fosse et à l'identification du corps. Elle avait finalement dû s'y résoudre « pour respecter le désir des autres parties impliquées ». Les descendants de García Lorca avaient également accepté de donner leur ADN pour identifier les restes de leur aïeul.

Il était alors précisé  que le rapport final des recherches devrait être établi dans les trois à six mois.

L'extrême réticence de la famille Lorca à accepter les recherches, a rapporté l’AFP, avait relancé les théories de certains historiens selon lesquelles le père du poète aurait transporté secrètement ses restes vers la résidence d'été de la famille, la Huerta de San Vicente, à Grenade (mp, 19/12/2009).

FEDERICO GARCÍA LORCA, LA LOI DE L’OUBLI

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DIÓSCORO GALINDO, ENSEIGNANT RÉPUBLICAIN. PHOTO EFEMERIDESTENERIFE
il en a fallu du temps et des efforts pour arriver là. Secouer la loi de l’oubli, septante ans après les faits, se défendre de vouloir rouvrir les plaies, vaincre les réticences des familles. Celle de Lorca précisément, à travers les neveux qui gèrent l’héritage, s’est toujours opposée à ces fouilles. Pas parce qu’ils ne veulent rien savoir, ont-ils plaidé, mais par refus d’une exhumation-exhibition médiatique.


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Les descendants de l’instituteur Dioscoro Galindo et du banderillero Francisco Galadi, fusillés en même temps que le poète, n’avaient pas cette crainte. A force d’insister, ils ont eu gain de cause. Ils sont allés voir le juge Baltasar Garzon, qui mène son combat contre l’amnistie des crimes franquistes. Ils ont l’appui d’Ian Gibson, le célèbre hispaniste et spécialiste de Lorca, scandalisé que l’on ait abandonné le corps de l’écrivain, «jeté dans un fossé comme un chien».

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DIÓSCORO GALINDO
Au début de l’été 1936, Federico García Lorca est un artiste heureux. Il vit ce qui apparaîtra avec le recul comme sa décennie prodigieuse. Il a publié en 1928 le Romancero gitan et en 1931 Le Poème du Cante Jondo. Entre les deux, il y a eu le voyage en Amérique, dont il ramènera Poète à New York et l’Ode à Walt Whitman. On traduit ses pièces en français, Bodas de sangre devient Noces de sang.

En 1931, il a salué l’avènement de la République, grâce à laquelle il tourne dans toute l’Espagne avec La Barraca. Il a été nommé directeur artistique de cette troupe de théâtre itinérante, qui joue les classiques du Siècle d’Or dans une approche populaire. En phase avec sa culture et avec son temps.

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JOAQUÍN ARCOLLAS CABEZAS
A Madrid, alors que les événements se précipitent, on s’inquiète pour lui. Il écarte des offres d’exil en Colombie et au Mexique. «Je suis un poète, on ne tue pas les poètes», répond-il à son ami Angel del Rio, qui le presse de le suivre en Amérique. Le 14 juillet, jour même de l’assassinat de Calvo Sotelo – le meurtre de ce champion de la droite servira de prétexte à un coup d’Etat préparé depuis longtemps –, il prend le train à la gare d’Atocha pour Grenade. Il rentre chez ses parents.


On s’est beaucoup interrogé sur ce retour, par lequel il se précipite dans le piège. Mais que pouvait-il lui arriver à la Huerta de San Vicente, la propriété de famille, où poussent le blé, le maïs, le tabac, les fèves, les fruits et les légumes? N’y passait-il pas volontiers ses étés?
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FRANCISCO GALADÍ MELGAR 
Lorca est né en 1898. C’est «l’année du désastre», qui voit l’Espagne perdre les derniers restes de son empire, les Philippines, Porto Rico et Cuba. Il faut remplacer le sucre de canne. Federico García père fera fortune dans la betterave. Il a hérité de sa première femme, dont il n’a pas eu d’enfants, de bonnes terres dans la vega, la fertile vallée de Grenade.

Oui, que pouvait-il lui arriver vu son entourage? A gauche, son beau-frère Manuel Fernandez Montesinos, un médecin socialiste qui vient d’être désigné alcalde, maire de la ville. À droite, la famille Rosales, des amis qui sont tous dans la Phalange espagnole, l’organisation fascisante créée par José Antonio Primo de Rivera.

Si l’artiste est comblé, l’homme, à 38 ans, est tourmenté. On le sait aujourd’hui, il a tout de même envisagé de gagner le Mexique, où se trouve l’actrice Margarita Xirgu, sa complice au théâtre. Mais il veut partir avec Juan Ramirez de Lucas, un étudiant qui rêve d’être acteur et dont il est tombé amoureux. Le jeune homme, qui est encore mineur – il a 19 ans –, s’est rendu à Albacete pour tenter d’obtenir l’autorisation de ses parents. De la Huerta de San Vicente, Federico téléphone, écrit une dernière lettre: «Je pense beaucoup à toi, entre les lignes tu dois lire toute l’affection que j’ai pour toi et toute la tendresse que mon cœur emmagasine.»

Il a fallu attendre la mort de Juan Ramirez de Lucas, en 2010 à 93 ans, pour que cette dernière histoire d’amour soit révélée, après septante ans de silence. Certains du coup en ont tiré la conclusion que «le blond d’Albacete» devait être le destinataire des onze poèmes fébriles et inédits publiés dans les années 80 seulement sous le titre Sonnets de l’amour obscur. L’intéressé, qui a fait par la suite une belle carrière de critique culturel, n’en croyait rien, assurant avoir partagé avec Lorca une relation paisible, joyeuse. Selon lui, c’était bien «RRR» qui avait inspiré ces sonnets, autrement dit Rafael Rodriguez Rapun, le secrétaire de La Barraca, auquel Lorca vouait durant les dernières années une passion orageuse et jalouse.

Lors du soulèvement militaire du 18 juillet, Grenade bascule d’emblée dans le camp nationaliste. Le maire et beau-frère Montesinos est arrêté. Les escuadras negras sèment la terreur en ville. Début août, à trois reprises, des visites d’intimidation ont lieu à la Huerta de San Vicente. Le poète et les siens sont bousculés, insultés. La famille aide un architecte socialiste caché dans la maison à rejoindre la zone républicaine. Federico, lui, ne veut pas partir. Il cherche refuge chez Luis Rosales, l’ami écrivain bien placé dans la Phalange, s’installe dans la maison de celui-ci, au 3e étage où l’on fait même monter un piano. En vain. Le 16 août, le jour même où Montesinos est assassiné, Lorca est arrêté, emmené au Gouvernement civil. Les interventions de Luis Rosales et de Manuel de Falla, compositeur à la gloire internationale et voisin également, n’éviteront pas au poète d’être conduit dans les environs de la ville pour y être fusillé.

Ce 19 août avant l’aube, dans les oliviers de Viznar, un garde civil accompagnant le commando racontera qu’il a dû aider le condamné paniqué à retrouver les mots pour sa dernière prière. Le thème de la mort est très présent dans l’œuvre de Lorca. Peut-être se souvient-il alors de l’un de ses premiers poèmes, intitulé «Adieux»:

«Si je meurs, laissez le balcon ouvert

L’enfant mange des oranges (de mon balcon je le vois)

Le faucheur fauche son blé (de mon balcon je l’entends)

Si je meurs, laissez le balcon ouvert!»

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 DALI ET LORCA
Pourquoi a-t-on tué García Lorca? De toute évidence, même s’il n’a jamais été militant ou membre d’un parti, il était un étendard de la République et des libertés. A son corps défendant? Ses meilleurs amis, Dali et Buñuel, minimiseront par la suite son engagement politique, mais ses assassins ont prétendu qu’il faisait «plus de mal avec sa plume que d’autres avec un revolver». «Je chante l’Espagne et je la ressens jusqu’à la moelle, expliquait-il en juin 1936 au journal El Sol dans ce qui sera sa dernière interview. Mais je suis du monde entier et frère de tous. Je déteste l’homme qui se sacrifie pour une idée nationaliste les yeux bandés. Bien sûr, je ne crois pas aux frontières politiques.»

On le tue comme «communiste» mais aussi comme homosexuel. Un complice des bourreaux se félicitera qu’on ait «tiré deux balles dans le cul à ce pédé». Les circonstances de son assassinat, telles quelles ont été démêlées depuis par les historiens, laissent envisager d’autres motifs. Le rapport de force entre factions insurrectionnelles peut avoir joué son rôle: l’homme venu l’arrêter est en froid avec la Phalange, à laquelle il veut peut-être montrer qui commande. Tout comme les rivalités de clans parmi les possédants et seigneurs du sucre: il y aura dans le peloton d’exécution un parent de la première femme de son père.
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 FEDERICO GARCÍA LORCA, ET LUIS BUÑUEL  
«À Grenade s’agite la pire bourgeoisie d’Espagne», avait un jour déclaré Lorca. A peine revenu dans cette ville provinciale et conservatrice, il y donne une lecture de sa dernière pièce, La Maison de Bernarda Alba. C’est l’histoire d’une famille étouffée par la religion, les conventions, l’argent, l’autorité. Certains s’y seraient reconnus, qui chercheraient vengeance. L’hypothèse rejoint la version donnée par Dali dans son Journal d’un génie (1964): «C’était un poète cent pour cent pur, l’être le plus apolitique que j’aie connu. Il a été la victime propitiatoire de questions personnelles, ultra-personnelles, locales.» Toutes les morts de Federico García Lorca.

Les fouilles entreprises en octobre 2009 sur les lieux indiqués trente ans plus tôt par un témoin du crime seront interrompues trois mois plus tard. 277 m2 ont été excavés. Rien. Pas le moindre os, pas la moindre dent, ni du poète génial ni de quiconque, explique l’archéologue responsable des fouilles. «Nous n’allons pas faire des trous tout autour de Grenade», assure alors la Junte d’Andalousie, c’est-à-dire le gouvernement régional qui finance les travaux.

Pourtant, en 2012, l’historien andalou Miguel Caballero Pèrez et l’archéologue aragonais Javier Navarro ont obtenu une autorisation de reprendre les recherches. Le premier a restitué dans un ouvrage paru l’année d’avant «les treize dernières heures de la vie de García Lorca». Le second a déjà mis au jour trente charniers de la guerre civile. Les chercheurs se sont déplacés à 800 m du premier endroit, à proximité d’un ancien camp d’instruction de la Phalange. Selon les estimations, plus de 3000 victimes auraient pu être enterrées dans le ravin de Viznar. Aux dernières nouvelles, qui datent de décembre dernier, des sondages ont permis de localiser des puits. L’Espagne n’a pas terminé de remuer son passé. En avril 1940, le Tribunal de Grenade avait établi un certificat de décès du poète, «mort des suites de blessures produites par faits de guerre».